Le dernier numéro de Vivre au Jabron va être rapidement distribué dans vos boites aux lettres...

Voici l'édito...

S’il est des pays sans arbres, ici il y a la forêt. Ici, l’été se déroule, se visite, savoureusement, dans la longue coulée de la Vallée et de ses émerveillements. De ricochet en ricochet, du plus simple au plus profond, de la surface des jours à l’émergence de la mémoire des lieux, l’été jette à nouveau sa pluie d’or et de lumière à travers la forêt, les villages, jusqu’à la rivière. D’histoire en histoire, d’année en année, le lien est profond. La forêt, c’est profond. Bien sûr, très peu on le sait, parfois un arbre est assassiné. En dehors même des raisons tacites, officielles, évidentes, raisonnées. Cette fois, c’était un châtaigner, familial, séculaire, mais d’une parcelle privée. Arraché à sa tribu. Le choc. Coupé, tronçonné, débité, emporté. Peut-être pour en faire des meubles. Mystère. Peut-être du bois dont on fait le feu, ou les flûtes. De l’argent. Cela peut paraître minuscule, cette affaire d’arbre en-volé... Il se passe des choses bien plus graves de par le monde – trafics et spoliations en tous genres - dont la teinte émotive des mots ne saurait vraiment témoigner. Pourtant, un bel arbre majuscule a été abattu, abattu et dérobé. Totem ancestral, où des vies se sont sculptées, où, entre les feuillages, apparaissaient des noms, des visages. C’est en ce point exact de la rêverie qu’une tronçonneuse intrusive et voleuse a tranché. L’ami n’étendra plus ses branches protectrices et généreuses à l’orée des saisons, des sentiers de Foncourelle, au fond du Jabron. Peu importe. C’est juste que le rapt singulier d’un châtaigner se cogne, par ricochet, à une question essentielle - habitants ou passants, particuliers ou gens de métier - sur ce que l’on doit de bienveillance aux plantes, aux arbres, à la forêt. On a tous besoin d’arbres remarquables. On a tous besoin de les laisser vieillir en paix parmi les humains. Heureusement, il y a dans la Vallée des associations, des familles, des communautés, qui travaillent au respect et à l’équilibre de la nature, au patrimoine forestier et paysager, qui tiennent à les préserver et faire circuler les savoirs sur ce domaine enchanté. C’est ainsi que peut se faire la passation, de génération en génération.

CR

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